Héraldique et blasons

Dictionnaire héraldique

contenant l’explication et la description des termes et figures usités dans le blason, des notices sur les ordres de chevalerie, les marques des charges et dignités, les ornements et l’origine des armoiries, les rois d’armes et les tournois, etc., suivi d’un Abrégé chronologique d’édits, déclarations, règlements, arrêts et lettres patentes des rois de France de la troisième race concernant le fait de la noblesse par Chérin

Auteur(s) : GRANDMAISON Charles de

 S'imprime et se vend chez J.-P. MIGNE, imprimeur, aux Ateliers catholiques, rue d'Amboise, 39, au Petit-Montrouge, autrefois dabbrière d'Enfer de Paris, maintenant dans PAris
 réédition (la première date de 1852)
  1861
 1 vol (570 p.), texte sur deux colonnes
 In-quarto
 demi-toile
 8 planches illustrées de blasons


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Après un passage par la faculté de médecine, Pierre-Charles-Armand LOIZEAU de GRANDMAISON, plus connu sous le nom de plume de Charles de GRANDMAISON, fait ses études à l’École des chartes où il soutient sa thèse en 1850. Quelques mois plus tard, il intègre la Bibliothèque nationale en tant qu’archiviste-paléographe attaché au catalogue du département des manuscrits. En 1852, il devient archiviste départemental d’Indre-et-Loire et publie, la même année, dans le cadre de la fameuse Encyclopédie théologique de l’abbé MIGNE, son Dictionnaire héraldique qui est réédité à l’identique en 1861. C’est cet ouvrage qui va faire l’objet de notre article.

Définie comme l’ensemble des usages et règles permettant de décrire et de représenter exactement armes et armoiries”, l’héraldique a connu son apogée à la fin du Moyen Âge en devenant une véritable science. Rappelons qu’à l’époque le blason n’était pas en lui-même un signe de noblesse, car les villes, les institutions, les corporations ou même les roturiers aisés pouvaient en disposer. Devant la multiplication de ces représentations, de véritables “professionnels” de l’héraldique ont fait leur apparition, car il convenait de ne pas usurper, volontairement ou non, les armoiries d’autrui. La Révolution mettra un coup d’arrêt à une pratique assimilée à un reliquat de la féodalité, mais elle reprendra au XIXe siècle avec la noblesse dite d’Empire.

Audelà d’être un signe ostentatoire d’identité, les armoiries présentent une grande importance pour les historiens et les archivistes. Elles servent souvent de signatures, étant omniprésentes sur les monuments et les documents anciens ; la difficulté étant, désormais, pour une très grande partie d’entre elles, de pouvoir être identifiées avec certitude. En France, des guides, comme ceux Louvan GÉLIOT et de Pierre PALLIOT, ainsi que des recueils provinciaux ou généraux, tels que l’Armorial général de France de 1696, sont des outils précieux, mais  la multiplication de ces représentations fait qu’il n’est pas toujours facile de retrouver lexact propriétaire de telle ou telle armoirie.

Afin de rendre la recherche plus aisée, certains auteurs, comme Jacques CHEVILLARD, expérimentent le classement des armoiries sous forme de dictionnaire. Mais, pour GRANDMAISON, l’utilisation de ce type d’ouvrages s’avère peu pratique car elle revient à retrouver un nom en partant d’une armoirie. Autre difficulté pour le lecteur : celle d’être confronté à un vocabulaire très spécifique. Il résume la difficulté de consultation de ces dictionnaires en ces mots : Les livres très nombreux qu’on a composés alors l’ont été dans un but tout autre que celui réclamé aujourd’hui par les esprits studieux. Ces livres, en effet, destinés à donner l’armoirie d’une famille connue, sont rangés par ordre alphabétique, et les recherches dirigées dans ce but y trouvent une solution très prompte et très facile. Mais, dans les études archéologiques, le problème est renversé ; l’armoirie étant connue, il s’agit de retrouver la famille ; il faut donc parcourir cette multitude de noms contenus dans les dictionnaires, et comme rien ne peut servir de guide dans cette laborieuse et pénible investigation, comme rien même ne peut indiquer si l’armoirie, objet de tant de labeur, se trouve représentée ou décrite dans l’ouvrage qu’on a entre les mains, il arrive souvent qu’après de longues heures inutilement passées à tourner les pages de plusieurs volumes, on rejette de dépit et de colère le livre muet.

GRANDMAISON a pour ambition principale de faciliter les recherches et d’abréger le travail des archéologues et des érudits français qui, chaque jour, rencontrent dans les châteaux et les églises, sur les tableaux, les armes, les cachets, les meubles et les monuments de toute sorte, des armoiries sans nombre“. Par commodité et pour garder un volume raisonnable d’informations, il a pris le parti de ne s’intéresser qu’aux productions antérieures au XVIe siècle, choix qui élimine d’emblée une grande partie de la noblesse dite « de robe ». Précédé d’un long exposé sur l’histoire des armoiries, assorti d’un lexique des “termes du blason”, le dictionnaire héraldique se compose de “mots clés par exemple : Agneau, Casque, Trèfle, Tau, Carreau, Cheval, Couronne, Phénix, Chevron, etc. –, chacun correspondant ici au motif principal de l’armoirie. Chaque terme donne lieu à l’énumération d’une série de noms de famille ou de villes, accompagnée de la description sommaire de la figure correspondante. Il suffit donc d’aller à la partie de l’ouvrage renfermant les figures analogues à celle qu’on a sous les yeux : aux lions, si c’est un lion ; aux chiens, si c’est un chien, et il suffira de parcourir quelques feuillets pour s’assurer si l’armoirie en question a été ou non décrite dans le livre“.

Ainsi, à “lion” – thème très usité en héraldique –, on trouve des dizaines et des dizaines de noms tels que Véroncourt, Bothorel de Mouillemure, Montfort, Faure de Massebras, Bonchamps, ou encore Chaunac, Toulouse, Sédillac. À titre d’exemple, nous présentons ci-dessous quelques descriptions d’armoiries, de familles et de cités :

Kerguelen – d’or, au lion de gueules, couronné et lampassé d’azur, cantonné d’un écartelé d’or et de gueules. Bretagne.

Le Riche de la Popelinière – de gueules, au coq perché sur une chaîne, à dextre en chef d’une étoile, le tout d’or. Ile de France.

Couespel – d’azur, à trois besants d’argent rangés en fasce, celui du milieu accompagné en chef et en pointe de deux têtes de lion du même. Normandie.

Lesneven – d’or, à un lion de sable, armé et lampassé de gueules, tenant dans ses pattes de devant une cornette d’azur, couronné et lampassé de gueules, chargé d’une fleur de lis d’or attachée à un trabe de gueules. Bretagne.

Comme on peut le voir, la manipulation de ce dictionnaire, comme tout ce qui traite de l’héraldique, nécessite la maîtrise d’un vocabulaire bien spécifique. Chaque terme technique, sur lequel l’auteur prend parfois le temps de s’attarder plus en détail, comme “meuble“, “pièce“, “brisure“, “sable“, “émail“, “gueule” ou “chef” et “quartier, prend ici un sens bien particulier.

Le livre n’est pas exempt de défauts, car les noms rangés sous les mots clés ne sont pas classés par ordre alphabétique, de sorte que le lecteur prend le risque de se perdre dans la consultation de l’ouvrage, en particulier quand il cherche un blason précis tout en ne sachant pas sous quel symbole il est rangé. L’auteur a pallié cet inconvénient en établissant la liste des différentes provinces, villes et maisons nobles dont les armoiries sont blasonnées dans ce livre et une table des matières thématiques.

Les descriptions de GRANDMAISON, qui ne rentre que rarement dans les détails, sont généralement très succinctes. En revanche, il consacre de longs développements à des chapitres “généraux” – Tournoi, Preuves de noblesse, Anoblissement, Grands officiers, Ordres de chevalerie, Roi d’armes, etc.  –, qui permettent de rompre la monotonie de cette longue énumération et confèrent à l’ensemble une utile mise en perspective historique. De plus, son dictionnaire est suivi de lAbrégé chronologique d’édits, déclarations, règlements, arrêts et lettres patentes des rois de France de la troisième race , concernant le fait de la noblesse, écrit au siècle précédent par Louis Nicolas Hyacinthe CHÉRIN. Enfin, il complète l’ensemble de son ouvrage par divers documents qu’il désigne sous le terme de “pièces détachées“, dont huit planches illustrées de blasons.

Même si son iconographie est très restreinte et si de multiples omissions y ont été relevées, ce dictionnaire héraldique, qui répondait à un besoin réel, recevra un accueil largement favorable du fait de son côté très pratique. Il restera longtemps une référence, avant d’être par la suite largement surclassé par d’autres ouvrages, comme celui de Camille DAYRE de MAILHOL et, plus récemment, par celui de Georges de CRAYENCOUR.

Quant à GRANDMAISON, il sera un membre très actif de la Société archéologique de Touraine, dont il prendra la responsabilité entre janvier 1868 et avril 1871, avant de présider la Société française d’archéologie. Il décèdera en juin 1903.



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