Archéologie, Histoire religieuse

Abécédaire ou rudiment d’archéologie (architecture religieuse)

ouvrage approuvé par l'Institut des provinces de France, pour l'enseignement de cette science dans les collèges, les séminaires et les maisons d'éducation des deux sexes

Auteur(s) : CAUMONT Arcisse de

 Paris, chez DERACHE, rue du Bouloy, n°7, DIDRON, rue Hautefeuille, n°13 ; Caen, HARDEL, imprimeur-libraire, rue froide, n°2 ; Rouen, LE BRUMENT, sucesseur de FRÈRE ; et chez les pricipaux libraires des départements
 3e édition (la première date de 1850)
  1854
 1 vol
 In-douze
 toile blanche, étiquette rouge avec titre et auteur
 portrait en frontispice de l'auteur par HILDEBRAND, nombreuses gravures en noir et blanc dans le texte


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Descendant de deux grandes familles de la noblesse française, Arcisse de CAUMONT témoigne dès son plus jeune âge d’un goût prononcé pour les sciences, en particulier pour l’histoire naturelle. Pourtant, dès l’obtention de son baccalauréat, il s’engage dans de brillantes études de droit. Mais en parallèle, il suit des cours à la faculté des lettres et à la faculté des sciences. Se passionnant pour l’histoire romaine et l’époque médiévale, il commence à publier des essais sur l’histoire et la géologie de son département natal, le Calvados.

Son diplôme de droit obtenu, CAUMONT crée en 1824, en association avec deux brillants intellectuels normands, Charles THOMINE des MAZURES et Jean Vincent Félix LAMOUROUX, la Société linnéenne de Normandie. Cette société scientifique, éditrice d’une revue, cherche à promouvoir, en s’appuyant sur une méthodologie “moderne”, l’étude du patrimoine de la région. Renouant avec son goût pour l’histoire, CAUMONT fonde l’année suivante la Société des antiquaires de Normandie, au sein de laquelle son influence sera décisive pour le développement des études d’archéologie et le travail de terrain en région. Il est en particulier à l’origine de l’ouverture de nombreux chantiers de fouilles et du lancement de prospections à travers toute la Normandie et les régions limitrophes. Il entend également éduquer le public et sensibiliser la population contre d’innombrables actes de destruction et de vandalisme, dont sont victimes nombre de monuments historiques. En 1834, il fonde la Société française d’archéologie pour la conservation et la description des monuments historiques.

Fortement marqué par les théories de LINNÉ, CAUMONT envisage une méthodologie moderne commune pour la botanique et l’archéologie. Le recensement et le classement des monuments peuvent être, selon lui, établis suivant une nomenclature scientifique basée sur l’observation. Sa grande œuvre sera désormais de réaliser une description et une classification des monuments antiques et médiévaux, selon l’ordre chronologique des styles.

La première étape consiste à étudier, inventorier et classer les monuments pour se constituer une importante base de données. Écumant les bibliothèques et les archives, rencontrant les membres des sociétés savantes, compulsant d’innombrables documents, aussi bien français qu’étrangers, se rendant également sur le terrain et effectuant des voyages d’étude, CAUMONT choisit de limiter son champ d’investigation à ce qu’il dénomme les “Antiquités nationales”, et de laisser de côté la Grèce, l’Italie et l’Égypte.

En février 1830, il ouvre à Caen, en se basant sur son patient travail de recherche et de synthèse, un cours public gratuit sur les “Antiquités monumentales”. La France ne dispose pas alors d’enseignement de l’histoire de l’art, et CAUMONT fait ainsi figure de précurseur. Si son auditoire reste limité, une publication reprenant ses cours, composée de six volumes et de six atlas, va lui permettre de faire largement connaître son œuvre, de générer des disciples et d’obtenir la reconnaissance de ses pairs, même au-delà des frontières nationales. Dès 1831, son cours est distingué par l’Académie des inscriptions et belles-lettres, et il reçoit une médaille d’or au concours des Antiquités nationales.

Infatigable travailleur et écrivain prolifique, CAUMONT publie en 1841 une Histoire de l’architecture religieuse au Moyen Âge en un volume contenant un atlas et richement illustré de gravures sur bois. L’auteur présente ce livre, consacré à sa période de prédilection, comme étant “destiné à l’enseignement de l’archéologie dans les séminaires et les écoles ecclésiastiques”, laissant ainsi entendre que c’est l’Église catholique qui est encore largement dépositaire de ce patrimoine à vocation religieuse. En 1850, sans doute soucieux de toucher un plus large public, il reprend la trame et l’iconographie de son ouvrage pour réaliser une nouvelle édition, remaniée et augmentée, rebaptisée Abécédaire ou Rudiment d’archéologie (architecture religieuse). Devant le succès rencontré par les deux premières éditions de ce livre – l’éditeur parle de 8 000 exemplaires écoulés dans toute l’Europe –, une troisième version augmentée de cent pages et de nouvelles illustrations voit le jour en 1854. Il s’agit de l’ouvrage présenté ici. Une autre édition suivra en 1859.

Contrairement à ce que pourrait laisser penser le titre, nous ne sommes ici en présence ni d’un dictionnaire ni d’un lexique organisé selon un classement alphabétique ou alphabético-thématique. L’ouvrage se présente comme une véritable leçon magistrale divisée en huit chapitres, et qui prend la forme d’un dialogue fictif : une question, figurée en italique, est posée et l’auteur y répond de manière développée et méthodique, utilisant de nombreux exemples illustrés de plans ou de gravures. Pédagogue avant tout, CAUMONT n’hésite pas à recourir à une abondante iconographie de qualité pour étayer son propos.

Après une présentation rapide des principaux éléments permettant de décrire les monuments (architraves, chapiteaux, cimaises, etc.), il présente sa classification des “styles architectoniques”. Il commence par aborder la période romane, subdivisée en trois époques qui se succèdent entre le Ve et le XIIe siècle, avant de se lancer dans l’étude du style gothique, qu’il appelle “ogival”, comprenant également selon lui trois périodes distinctes. Il complète l’ensemble par une présentation plus succincte du style Renaissance.

Contrairement à certains de ses collègues qui tendent à verser dans l’exaltation romantique, usant et abusant de figures de style élégantes et ampoulées, ainsi que de digressions historiques et romanesques, CAUMONT recherche avant tout l’efficacité pédagogique. Son style est certes assez académique et dénué de fantaisie mais, précis, il va à l’essentiel. Ce choix permet de bien se faire comprendre d’un public “profane”, mais il en résulte une certaine sécheresse du discours, plus proche de celui d’un manuel scolaire que d’une œuvre d’érudition. Il convient en revanche de souligner la variété et la qualité des exemples choisis.

Devant le succès de cet ouvrage, deux autres volumes viendront compléter ce qui devient une collection : celui consacré à l’architecture civile et militaire, publié en 1853, et celui dédié à l’époque gallo-romaine, qui paraît en 1862.

Fidèle à sa mission de vulgarisateur et de pédagogue, doté par ailleurs d’une grande curiosité universelle et d’une force de travail remarquable, CAUMONT est également à l’origine de la création de l’Association normande pour les progrès de l’agriculture, de l’industrie et des arts, des Congrès scientifiques de France, de l’Institut des provinces de France, et du Congrès des délégués des sociétés savantes des départements. Seul son décès survenu en 1873 mettra un terme à cette foisonnante activité. Si son nom n’a pas connu la même renommée que ceux de Prosper MÉRIMÉE et d’Eugène VIOLLET-LE-DUC, CAUMONT se trouve pourtant être en France le véritable pionnier dans les domaines de l’archéologie, de l’histoire de l’art et de la sauvegarde du patrimoine historique.



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