Falsification, Chimie

Petit dictionnaire des falsifications

avec l'indication de moyens faciles pour les reconnaître

Auteur(s) : DUFOUR Léopold

 Paris, librairie Germer Baillère et Cie, 108, boulevard Saint-Germain, au coin de la rue de Hautefeuille
 deuxième édition revue, corrigée et considérablement augmentée ; suivie d'une notice sur le laboratoire municipal de Paris
  1881
 1 vol (189 p.)
 In-douze
 demi-cuir brun clair, papier marbré, dos lisse avec motifs doré, pièce de titre de maroquin rouge


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Les falsifications et les contrefaçons, sources de danger pour la santé et l’ordre public, ont depuis toujours été combattues par les autorités et les corps constitués. Le développement de la chimie et l’avènement de l’âge industriel ont procuré de nouveaux procédés aux falsificateurs, mais ils ont aussi permis aux contrôleurs de disposer de moyens de détection plus efficaces. Les falsifications se faisant de plus en plus nombreuses dans les domaines aussi divers que les produits manufacturés, les matières premières et l’alimentation, des manuels, des guides, mais aussi des dictionnaires ont été proposés à un public de plus en plus averti et vigilant. Ainsi, le Dictionnaire des altérations et falsifications des substances alimentaires, médicamenteuses et commerciales, déjà présent sur Dicopathe et publié pour la première fois en 1850 par Alphonse CHEVALLIER, rencontrera un beau succès pendant près d’un demi-siècle.

En 1877, L. DUFOUR, “pharmacien de 1ère classe, ex-interne des hôpitaux de Paris, ancien professeur de chimie”, publie à son tour un Petit Dictionnaire des falsifications. Plusieurs indices laissent à penser qu’il s’agit de Léopold DUFOUR, établi à Orléans. Moins volumineux, mais également meilleur marché que son “concurrent”, cet ouvrage se veut plus accessible au grand public car, ne nécessitant pas de connaissances poussées en la matière, il s’appuie sur des substances “qu’on trouve dans les ménages ou qu’il est facile de se procurer”. Le livre connaîtra une certaine audience, au point d’être à nouveau édité en 1881 dans une version remaniée et augmentée.

En préambule, l’auteur rappelle le cœur du sujet : “La falsification consiste à substituer, en tout ou en partie, à un produit d’un prix relativement élevé, un autre produit d’un prix inférieur, mais pouvant se confondre par son aspect avec le premier.” Notre scientifique déplore le relatif “laxisme” dont font preuve les autorités de son pays en comparaison de pays comme l’Angleterre ou l’Allemagne :“Si on livre un produit falsifié pour un produit pur, on commet un délit que la loi punit. Mais malheureusement, la loi est trop rarement appliquée.” En revanche, il se félicite de l’initiative prise par le conseil municipal de Paris de fonder, en 1880, dans les locaux de la préfecture de police, un laboratoire moderne, capable de réaliser les analyses pour déceler les fraudes, y compris pour des particuliers.

Même s’il traite des produits les plus divers comme les ustensiles de cuisine, les pièces de monnaie, les bougies ou les teintures, DUFOUR centre son propos sur les falsifications les plus dangereuses : celles qui touchent les aliments et les médicaments. Rappelant que les drogues simples doivent être pures et de première qualité, il professe que les préparations doivent être réalisées selon les formules inscrites au codex, avec des substances de premier choix, sous peine de créer des médicaments moins actifs voire inertes.

La liste des astuces et des trucages utilisés donne le frisson, tant certaines préparations sont clairement dangereuses… C’est ainsi que beaucoup de produits nocifs ou peu ragoûtants sont utilisés pour colorer les aliments ou en renforcer le goût. DUFOUR nous apprend qu’“on colore quelquefois les bonbons avec des matières colorantes à base d’arsenic, de plomb, de cuivre, etc., ce qui peut causer des empoisonnements”, que le sel est parfois mélangé à du talc, du plâtre, du sable, de l’argile, du sulfate d’alun, que le cacao est parfois mélangé à de la graisse de mouton, du cinabre ou du minium, et que le café peut être coloré avec du bleu de Prusse ou de la plombagine.

À chaque fois, notre chimiste patenté indique un procédé simple pour déceler la malfaçon. Ainsi, dans le cas de sirops coupés avec du glucose, il conseille d’en mélanger une cuillerée dans un volume d’eau équivalent, et d’y ajouter une goutte de solution d’iodure de potassium pour voir si le liquide ne prend pas une teinte violacée qui témoigne de la présence de l’additif proscrit. Pour détecter une fraude sur la bière, il conseille de la faire bouillir avec un morceau de laine blanche. Si, après cette opération, la laine passée sous l’eau reste colorée de jaune vif, c’est le signe de la présence d’acide picrique frauduleusement utilisé pour renforcer l’amertume du breuvage.

Après ce dictionnaire, qui connaîtra deux autres éditions, DUFOUR signera en 1892 un Manuel de pharmacie pratique, réédité en 1903. Notre exemplaire a été relié avec un autre ouvrage : la quatrième édition de Médecine populaire ou Premiers Soins à donner aux malades et aux blessés en l’absence du médecin, du docteur Léopold TURCK.

Quelques extraits

*Absinthe : cette liqueur, qui fait tant de victimes, doit parfois sa coloration à un sel de cuivre. On constate la présence de ce métal en évaporant une certaine quantité de liqueur et en calcinant le résidu sur un morceau de porcelaine. Avec le résidu de la calcination et une quantité suffisante de vinaigre fort, on fait une pâte molle qu’on abandonne à elle-même pendant vingt-quatre heures. Au bout de ce temps, on l’étend en couche sur une lame de couteau bien polie, on laisse quelques minutes et on lave sans frotter ; si l’absinthe contient du cuivre, la lame sera recouverte d’une légère couche de cuivre rouge.

*Cornichons : dans le but d’avoir des cornichons d’un beau vert, on a la mauvaise habitude de les faire bouillir avec du vinaigre, dans une bassine en cuivre non étamée. Leur coloration est due à la présence du vert-de-gris qui se forme par l’action du vinaigre.

*Poivre : on a quelquefois falsifié le poivre avec les fruits du nerprun. Ceux-ci n’ont pas tout à fait l’aspect du poivre ; mais ce qui permet de les reconnaître facilement, c’est qu’ils n’en ont pas du tout l’odeur.

*Quinquina : on vend quelquefois dans le commerce des quinquinas ayant servi, auxquels on donne de l’amertume en les trempant dans une solution d’acide picrique. On livre quelquefois comme quinquinas rouges de mauvais quinquinas jaunes trempés dans l’ammoniaque et séchés, et comme poudre de quinquina rouge, de la poudre de quinquina colorée par le santal.



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