Jardinage, horticulture

Dictionnaire pour la théorie et la pratique du jardinage et de l’agriculture

par principes, et démontrées d'après la Physique des végétaux

Auteur(s) : SCHABOL Jean-Roger

 à Paris, chez DEBURE père, libraire, quai des Augustins, à Saint-Paul
 nouvelle édition (la première date de 1767)
  1770
 1 vol (LXXVIII-528 p.)
 In-douze
 veau brun moucheté, dos à cinq nerfs, caissons et coiffes ornés de motifs floraux dorés, pièce de titre de maroquin rouge
 gravure en frontispice représentant la porte d'entrée ouverte d'un jardin dont le tympan est orné d'un portrait en médaillon, bandeaux décoratifs, vignettes hors-texte, culs-de-lampe, lettrines


Plus d'informations sur cet ouvrage :

En dépit de ses opinions jansénistes, Jean-Roger SCHABOL bénéficie pendant plusieurs années de la protection du cardinal de NOAILLES, qui lui permet d’assurer d’importantes responsabilités à Paris. Après la mort de son bienfaiteur, il se met à l’écart de la vie publique et, dans sa retraite de Sarcelles, se consacre à sa grande passion : le jardinage. Il commence alors à rédiger des essais et des traités qui, très vite, attirent l’attention des amateurs.

Depuis la Renaissance, le jardinage, aussi bien dans son aspect “vivrier” qu’ornemental, jouit d’une considération croissante, de la part du grand public mais aussi des élites. Sous le règne de LOUIS XIV, cette pratique bénéficiera de la faveur royale, finissant même par être considérée comme une science, voire un art. Pour les classes aisées, le jardinage devient tout à la fois un loisir respectable et une source de prestige. Au XVIIIe siècle, il prend une dimension philosophique et témoigne d’un goût de plus en plus prononcé pour un retour à la nature, faisant figure d’allégorie d’un univers harmonieux et raisonné.

Dans le domaine du jardinage, l’ouvrage fondateur aura été Théâtre d’agriculture et mesnage des champs, d’Olivier de SERRES, qui paraîtra en 1600. Ce livre était alors axé sur la fonction “agricole” du jardin, vu comme pourvoyeur de fruits, de légumes, d’herbes aromatiques et médicinales. Autre ouvrage marquant, celui d’Antoine-Joseph DEZALLIER d’ARGENVILLE, La Théorie et pratique du jardinage, qui, paru en 1709, rencontre un succès considérable et achève de démocratiser la pratique. La renommée de cet auteur est telle que, plusieurs décennies plus tard, il sera sollicité par l’équipe de l’Encyclopédie pour rédiger 540 notices de l’ouvrage. L’article Cautère, qu’il publie en 1765 dans le supplément placé à la fin du dix-septième tome, retient particulièrement notre attention. En effet, DEZALLIER d’ARGENVILLE y fait directement référence au fait que SCHABOL, auquel il témoigne une grande estime, prépare un dictionnaire : “Par les soins de M. l’abbé Roger, qui depuis plus de quarante ans a fait des études particulières sur la végétation, on sera bientôt instruit de leur manière de tailler & de gouverner les arbres fruitiers, particulièrement les pêchers. Il nous donnera incessamment sept vol. in-12 sur cette matière, compris un dictionnaire des termes du Jardinage & un catéchisme complet de cet art par demandes & par réponses.”

Contrairement à la coutume, SCHABOL commence par rédiger son Dictionnaire pour la théorie et la pratique du jardinage en 1767, avant les manuels prévus pour une publication postérieure. Malheureusement, l’auteur décède en avril 1768 sans avoir pu achever l’ouvrage en chantier. Le manuscrit est alors repris et complété par Antoine-Nicolas DEZALLIER d’ARGENVILLE, fils de son ancien ami décédé en 1765, permettant ainsi à La Pratique du jardinage de voir le jour en 1770 chez le libraire Jean DEBURE, qui, pour l’occasion, rééditera le dictionnaire. C’est cette version en trois volumes qui est présentée ici. L’année suivante, La Théorie du jardinage sera commercialisée à son tour.

Peu enclin à l’humilité et à la reconnaissance, SCHABOL consacre une longue introduction, intitulée Discours sur le jardinage, à la présentation de ses propres découvertes, mais surtout à dénigrer le travail de ses devanciers. Il accuse à demi-mot ses prédécesseurs de s’être contentés d’une certaine routine et d’avoir entériné les erreurs du passé, faute d’expérimentations pratiques et d’idées neuves, alors que, selon lui, dans son livre “Tout est neuf, tant pour les idées que pour la façon d’opérer”, car “Tout ce qu’il [l’auteur] enseigne pour arriver à une plus prompte & plus heureuse végétation, que jusqu’ici, non seulement n’est point pratiqué par le commun des jardiniers, mais il ne se trouve dans aucun des écrits de tant d’auteurs qui se sont exercés à l’envi sur la culture des arbres”.

Revendiquant 28 années de travaux, d’observations et d’expérimentations réalisées dans sa maison de Sarcelles, SCHABOL s’inspire en particulier des techniques utilisées par les habitants de la petite ville de Montreuil pour optimiser la production de leurs pêchers. Ces arbres étaient installés en espaliers sur des murs palissés, bientôt surnommés murs à pêches. Après avoir interrogé les paysans, SCHABOL adopte leur méthode pour l’expérimenter chez lui et en tirer une série de conclusions scientifiques. En toute immodestie, il se flatte de remédier aux “maux & la dépravation du jardinage”, et de “faire de cet art purement méchanique une science proprement dite”.

Ce dictionnaire était destiné à servir d’introduction aux ouvrages théoriques qui devaient suivre, ce qui explique que son auteur ne s’y lance pas dans des démonstrations détaillées. Ses définitions sont assez courtes, une grande partie d’entre elles étant consacrées à la physiologie végétale, à l’outillage et aux termes purement techniques. Finalement, se refusant à adopter des pratiques véritablement révolutionnaires, il se range à une conception moderne et raisonnée du jardinage.

Malgré son assurance, SCHABOL semble avoir ignoré certains progrès accomplis par la science et la botanique, ainsi que les prémices de la révolution agricole qui s’annonçait. Il se base parfois sur des notions erronées, en particulier en physiologie, refusant par exemple l’idée que les fleurs puissent être sexuées. Les ouvrages de SCHABOL connaîtront un certain succès et seront réédités plusieurs fois, mais dès le siècle suivant ils seront considérés comme incomplets et obsolètes.



Laisser un commentaire

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Post comment