Malais (langue)

Dictionnaire malais-français | Dictionnaire français-malais

contenant: les mots malais en caractères arabes, avec leur prononciation figurée en caractères latins ; leur étymologie ; leur sens propre et figuré, avec un grand nombre d'exemples ; une indication des langues de l'archipel indien et de 1'Océanie, dans lesquelles les mêmes mots se retrouvent, avec la différence qu'ils y ont subi, soit dans le sens, soit dans la prononciation ; des remarques toutes les fois que le mot a une origine commune avec son correspondant dans les langues indo-européennes

Auteur(s) : FABRE Pierre-Étienne-Lazare

 Vienne, imprimerie impériale et royale ; Paris, Maisonneuve et Cie, quai Voltaire, 25
 édition originale
  1875-1880
 3 vol : malais-français (XXVI-916-879 p) ; français-malais tome 1 (XXVIII-931 p.), tome 2 (915 p.)
 In-octavo
 demi-basane d'époque, dos à cinq nerfs, les initiales H.M.M. figurent en bas du dos de chaque livre


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Simple curé de campagne à l’origine, Pierre Étienne Lazare FAVRE, plus connu sous le nom de l’abbé FAVRE, rejoint en 1842 le séminaire des Missions étrangères installé à Paris. Fondée sous LOUIS XIV, cette institution a alors pour objectif l’évangélisation de l’Asie. Après quelques mois de préparation, notre abbé embarque pour Singapour, et de là rejoint Penang, située dans le détroit de Malacca. Cette île abrite alors un Collège général, c’est-à-dire une école destinée à former le clergé local, majoritairement originaire de Chine, du Vietnam et de Thaïlande. Après y avoir enseigné quelques années, il est nommé à Malacca où, malgré un conflit larvé avec le clergé portugais du lieu, il parvient à procéder à des évangélisations, en particulier dans la communauté chinoise. Le missionnaire se fait également explorateur et ethnologue, réussissant à nouer des contacts avec des tribus aborigènes très isolées.

Après un passage en Amérique latine et un bref séjour en France en 1856, il revient à Penang. Malheureusement la maladie le contraint, dès l’année suivante, à rentrer définitivement au pays. Il quitte donc les Missions étrangères pour redevenir simple curé de campagne. C’est alors que les circonstances vont l’aider à sortir de l’ombre. Il est en effet sollicité en 1860 pour donner un cours de langue malaise à l’École spéciale des langues orientales vivantes de Paris ; puis en 1864 pour remplacer le titulaire de la chaire de malais et d’indonésien, l’orientaliste Édouard DULAURIER qui, ayant décidé de se spécialiser dans l’arménien, le recommande vivement. Prenant à cœur sa nouvelle fonction, Favre va doter l’enseignement de l’indonésien et du malais d’outils grammaticaux et lexicographiques. Après des ouvrages consacrés au javanais, il s’attaque à un livre en langue malaise, mais la guerre de 1870-1871 vient retarder la finalisation de l’ouvrage. En 1875, il publie enfin son Dictionnaire malais-français, complété en 1880 par son Dictionnaire français-malais. Sans que nous en connaissions la raison – “par suite de circonstances regrettables mais indépendantes de notre volonté”, écrit-il –, FAVRE doit “recourir à une imprimerie étrangère”. Finalement, c’est par les bons offices de l’Imprimerie impériale et royale de Vienne, que ses deux dictionnaires sont imprimés et publiés, pour être ensuite distribués en France par la société Maisonneuve.

Avant de se lancer dans sa tâche, FAVRE prend connaissance des travaux antérieurs effectués par les Hollandais Jan PIJNAPPEL et Hildebrand Cornelis KLINKERT, et par le britannique William MARSDEN,  mais aussi de ceux de son ancien “confrère” François ALBRAND, qui, trente ans auparavant, avait entamé la rédaction d’un dictionnaire malais-français sans avoir pu la mener à son terme. Enfin, il s’appuie sur les travaux d’Édouard DULAURIER, qui a permis à la France de se doter d’une riche collection de manuscrits javanais et malais.

Rejoignant l’opinion de LAKANAL, qui avait déclaré dès 1795 que le malais “était une langue dont l’utilité, dont la connaissance est des plus utile pour le commerce”,  FAVRE ne cache pas l’objectif ouvertement “colonial” de son ouvrage : “Sa publication a pour but de favoriser nos relations diplomatiques et commerciales dans l’Extrême-Orient, et en facilitant l’étude d’une langue répandue dans ces régions si variées, si heureusement douées de la nature, si bien disposées pour le trafic international, de contribuer à étendre l’influence de notre pays et la prospérité de nos colonies voisines.”

Depuis l’ouverture du canal de Suez en 1869, l’Asie du Sud-Est est devenue accessible de l’Europe en quelques semaines, au lieu de plusieurs mois quand il fallait emprunter la route du cap de Bonne-Espérance. Les grandes puissances européennes cherchent à assurer leur implantation dans la région et à y étendre leur domination politique, militaire et économique. Pendant que les Britanniques établissent leur protectorat en Malaisie, et que les Hollandais achèvent la conquête de l’Indonésie, les Français quant à eux aspirent à s’implanter en Indochine.

La langue malaisienne se subdivise en une série de dialectes pratiqués en Thaïlande, à Bornéo et surtout en Indonésie. Notons au passage que cette langue a également une parenté avec le malgache, les langues des Philippines et le polynésien. Le malais et l’indonésien sont en outre des langues très proches et partagent une grande partie d’un même lexique. En outre, cette région du monde abrite d’importantes communautés chinoises et indiennes, avec lesquelles le malais peut servir de langue d’échange.

Dans les dictionnaires de FAVRE, les mots sont écrits en alphabet arabo-malais, accompagnés de leur transcription phonétique en alphabet latin. On y trouve des équivalents dans d’autres langues “cousines” qui utilisent des alphabets comme le batak, le javanais, le tagal (tagalog), le bisaya, le macassar et même le sanscrit. Une des originalités de FAVRE est d’avoir considérablement élargi son champ d’investigation, au-delà de la Malaisie elle-même. Par moments, il tente une approche étymologique, allant parfois jusqu’à la comparaison avec les langues indo-européennes.

Les dictionnaires de FAVRE, les premiers du genre en français, s’imposeront pour longtemps comme la référence francophone sur le sujet. Mais ce travail pionnier sera parfois critiqué et contesté sur le fond comme sur la forme. Le plus virulent détracteur sera un autre orientaliste confirmé, nommé Alfred TUGAULT. Dans un fascicule intitulé Mille et un échecs de l’abbé FAVRE, ce dernier énumère les approximations et les erreurs de traduction contenues dans les dictionnaires de son collègue. Mais, même si ses remarques sont souvent justifiées, son propos semble être par moments marqué par la mauvaise foi, en particulier quand il raille la volonté de FAVRE de comparer et de rapprocher les langues de la région. De fait, TUGAULT, auteur en 1863 d’une grammaire malaise, se trouvait être le concurrent malheureux de FAVRE pour la chaire de DULAURIER, et il avait très mal pris sa défaite. Il finira pourtant par publier son propre dictionnaire en 1898 et occuper à son tour la place tant convoitée.

FAVRE publiera encore un catéchisme en langue malaise, avant de décéder en 1886 et d’être remplacé par Aristide MARRE à l’École des langues orientales.



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