Poste

Dictionnaire des postes

Contenant le N° de toutes les villes, bourgs, paroisses, abbayes, & principaux châteaux du Royaume de France & du Duché de Lorraine. Les provinces ou ils font situés, & le nom du plus prochain bureau des postes, où les lettres doivent être adressées pour chacun desdits endroits. Les principales villes de l'Europe, les états où elles sont situées, & la distinction de celles pour lesquelles il faut affranchir. Differentes observations utiles à tous ceux qui font en Commerce de Lettres. Livre nécessaire à toutes personnes, pour adresser exactement leurs Lettres, & éviter le retard, ou la perte que le défaut de bonne adresse peut occasionner. Dédié à monseigneur le comte d'ARGENSON, grand maistre et surintendant général des postes et relais de France.

Auteur(s) : GUYOT Edme-Gilles

 à Paris chez le veuve DELATOUR, imprimeur de la cur des aides & de la Ferme générale des postes, rue de la Harpe, aux Trois rois
 édition originale
  1754
 1 vol (493 p.)
 In-quarto
 veau brun, dos à cinq nerfs
 bandeaux, culs-de-lampe


Plus d'informations sur cet ouvrage :

D’abord réservé aux messages officiels, le réseau de distribution de la poste, constitué de bureaux et relais placés depuis 1643 sous l’autorité d’un surintendant des postes, va prendre progressivement en charge le courrier des particuliers. Des maîtres de courrier agréés, nommés par le roi, supervisent le travail des postillons et des maîtres de poste. En 1672, cette institution devient une ferme générale, c’est-à-dire qu’elle est louée à des financiers par un bail renouvelable. Le courrier interne aux grandes villes, dit la “petite poste“, échappera un temps à ce système, mais la centralisation est en marche.

En 1708 est publié le premier “livre de poste”, qui contient la description des routes et la liste des relais, soit 800 au début du XVIIIe siècle. On y trouve également les distances entre les différents relais et le prix à payer aux maîtres de poste. Avec l’accroissement du volume de courrier, des voitures sont désormais aménagées pour accueillir des passagers. Cet ouvrage, qui aura un grand succès au point de susciter des contrefaçons, sera régulièrement édité jusqu’en 1859.

En 1754, Edme-Gilles GUYOT, “employé dans les postes à Paris”, publie le Dictionnaire des postes présenté ici. Ce livre, qui ne peut avoir été rédigé qu’avec le soutien actif de sa hiérarchie, se veut un guide pratique “au moyen duquel chacun pourra, en mettant à ses lettres des adresses correctes, le guider avec sûreté à leurs véritables destinations”. En effet, l’un des problèmes récurrents de la distribution du courrier réside dans les erreurs d’adresse et les homonymies de localités. C’est ainsi qu’il existe, par exemple, huit Martigny répartis dans quatre provinces différentes, et quatre Barville qui entraînent de nombreuses erreurs de distribution. Comme le rappelle l’auteur, il est “très essentiel que la suscription d’une lettre soit exacte & correcte, pour qu’elle puisse passer directement à son adresse ; plusieurs personnes sont dans l’usage de rejeter sur les commis des postes le défaut de remise des lettres à leur destination, quoique ce défaut vienne presque toujours du vice de l’adresse qui est fausse, la quantité immense des lettres en rebut, mal adressées, en est une preuve convaincante”.

En 1749, une première solution avait été imaginée pour corriger les erreurs d’adresse. En effet, au bout de trois mois les lettres non distribuées étaient désormais ramenées dans le bureau d’où elles étaient parties, ce qui permettait à ceux qui les avaient envoyées de les récupérer et de corriger l’adresse. Mais l’importante masse des courriers défectueux causait une telle perte de temps et d’argent qu’il valait mieux s’attaquer à la source du problème en aidant les usagers à renseigner correctement les adresses.

Le livre présenté contient une longue liste alphabétique de villes et de localités, mais aussi d’abbayes et de paroisses, pour lesquelles sont indiqués la province correspondante et le bureau de poste auquel il convient d’adresser le courrier. Ainsi, pour Lesneven en Bretagne, il s’agit de Landerneau ; pour Acheux en Picardie, de Doullens ; pour Montady dans le Languedoc, de Béziers ; et pour Martel dans le Quercy, de Souillac ; alors que la ville de Champs-sur-Marne en Île-de-France se trouve rattachée au bureau de Chelles. En feuilletant l’ouvrage, on découvre ponctuellement que l’orthographe de certaines localités a été quelque peu “écorchée”, comme Chavigny au lieu de Chauvigny, Lanpaul-Plouarel au lieu de Lampaul-Plouarzel, Enguien au lieu d’Enghien, ou encore Souencé à la place de Souancé ; autant d’erreurs qui ont pu avoir pour effet de compliquer les opérations d’adressage.

Pour être complet, GUYOT a également retenu dans son ouvrage les bureaux de poste du Comtat Venaissin, enclave sous juridiction papale au cœur du royaume de France ; de la principauté de Dombes ainsi que du duché de Lorraine et de Bar. On y trouve également, sous forme de pense-bête, une liste des principales villes d’Europe avec le nom de l’État correspondant ; c’est le cas d’Annecy, alors située en Savoie appartenant au royaume de Sardaigne, d’Aberdeen ici déformé en Aberdon, de Cracovie, Nimègue, Trente ou Ulm. Notons que les localités d’outre-mer ne sont pas oubliées telles, par exemple, Cap-Breton, Québec, Saint-Pierre de la Martinique, Saint-Domingue, etc.

Quant à Edme-Gilles GUYOT, ce n’est pas par cet ouvrage qu’il acquerra la renommée, mais grâce à son autre passion : les sciences. Il se rendra célèbre en cherchant à démonter les tours de magie et les illusions d’optique. Cette action lui vaudra bien entendu l’inimitié des magiciens, des saltimbanques, des prestidigitateurs, mais aussi des charlatans et des spirites qui avaient recours à des procédés visuels spectaculaires pour abuser leurs victimes. Par ailleurs, ses démonstrations de lanterne magique lui assureront une certaine popularité. GUYOT écrira également sur la médecine et les mathématiques, domaines pour lesquels il fera également montre d’une réelle expertise. Son livre Nouvelles Récréations physiques et mathématiques, dont les quatre volumes seront édités entre 1769 et 1770, connaîtra un beau succès. Il décèdera à Paris en 1786.

L’ouvrage est dédié au comte d’ARGENSON, qui est à l’époque ministre de la Guerre et “grand-maistre et surintendant général des postes et relais de France”. Notre exemplaire comporte également un ex-libris de la Bibliothèque philatélique de Clément RUEFF.



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