Littérature française

Dictionnaire de morale et de littérature

Auteur(s) : MOLIÈRE (auteur fictif), LABAT Paul

 Paris, chez madame RÉMY-BRÉGEAUT, libraire, rue de la Harpe, BROCKHANS et AVÉNARIUS (successeurs de BOSSANGE père), libraire du roi, rue Richelieu, 60
 édition originale
  1838
 1 vol. (III-315 p.)
 In-douze
 demi-chagrin noir, dos lisse avec motifs dorés imprimés à froid, titre en lettres dorées
 gravure en frontispice représentant MOLIÈRE dans un fauteuil, lettrines ornées, bandeaux décoratifs, culs-de-lampe


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Bien que figurant comme auteur sur la page de titre, Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE, n’a pas réalisé cet ouvrage qui n’est en fait qu’une anthologie de morceaux choisis tirés de l’œuvre du célèbre dramaturge. Si nous en croyons l’écrivain Paul LACROIX, ce florilège aurait été composé par un dénommé Paul LABAT, probablement en réponse à une commande de libraire.

Le Grand Siècle a vu en France l’émergence de ce que des spécialistes contemporains ont appelé le “vedettariat théâtral”. Depuis sa mort en 1673, MOLIÈRE fait figure de monument national de la littérature française, et ses pièces sont désormais des classiques incontournables du répertoire français. À l’instar de SHAKESPEARE en Angleterre, sa personne accède au statut de véritable mythe. Il sera pour une longue période la référence à partir de laquelle chaque nouvel auteur de théâtre devra se définir.

Le théâtre devenant un loisir de plus en plus populaire, désormais adoubé par les élites littéraires et intellectuelles, les œuvres de MOLIÈRE sont largement représentées et diffusées. Ses personnages fournissent matière à des archétypes largement repris dans la littérature et les expressions populaires. Les éditions des œuvres complètes du dramaturge se multiplient au XVIIIe et au XIXe siècle, de même que des biographies et des analyses littéraires. La Comédie française et d’autres troupes de théâtre se placeront d’emblée sous son égide et, en 1844, une fontaine monumentale accueillant sa statue sera érigée en face de la maison où il est mort.

MOLIÈRE sera célébré comme l’homme de théâtre par excellence, réputation renforcée par les circonstances légendaires de sa mort survenue lors d’une représentation. Dès le XVIIIe siècle il bénéficie en outre de l’image d’un moraliste qui brocarde volontiers les ridicules et les injustices de son temps. La pièce Tartuffe en particulier, et les controverses qu’elle a déclenchées font qu’au cours du siècle des Lumières et au XIXe siècle l’auteur sera présenté comme une victime de l’obscurantisme religieux. Certains iront jusqu’à en faire un emblème de la liberté, voire, avec un anachronisme certain, une figure de l’anticléricalisme.

Dans le recueil ici présenté, les citations choisies font allusion au monde des lettres et à la “morale”, appellation généraliste qui englobe les mœurs, les sentiments, les types de caractères, les qualités et les défauts, les loisirs, la médecine ou la justice. Conséquence du succès de ses œuvres, certaines des saillies de ses personnages sont devenues au cours des siècles de véritables maximes intégrées au langage courant.

Dans ce dictionnaire, où nous ne trouvons ni commentaire ni analyse, chaque entrée est suivie d’une ou de plusieurs citations avec l’indication de la pièce d’où elles sont tirées. Certains thèmes sont particulièrement fournis, comme celui des femmes, du mariage, des dévots, et bien sûr des médecins, cible privilégiée de la plume acérée de MOLIÈRE. Parmi bien d’autres extraits, nous pouvons illustrer sa verve satirique à leur encontre par ce passage du Médecin malgré lui : « Je trouve que c’est le métier le meilleur de tous : car, soit qu’on fasse bien ou soit qu’on fasse mal, on est toujours payé de même sorte. La méchante besogne ne retombe jamais sur notre dos : et nous taillons, comme il nous plaît, sur l’étoffe où nous travaillons. Un cordonnier, en faisant des souliers, ne saurait gâter un morceau de cuir qu’il n’en paye les pots cassés : mais ici l’on peut gâter un homme sans qu’il en coûte rien. Les bévues ne sont point pour nous : et c’est toujours la faute de celui qui meurt. Enfin le bon de cette profession est qu’il y a parmi les morts une honnêteté, une discrétion la plus grande du monde : jamais on n’en voit se plaindre du médecin qui l’a tué. »

Notons au passage que MOLIÈRE fait l’objet d’une entrée, s’étant lui-même mis en scène dans l’Impromptu de Versailles et ayant fait citer son nom par un des personnages du Malade imaginaire. En guise de préface, ce dictionnaire reprend mot pour mot le texte de celle des Précieuses ridicules.

Le dictionnaire-florilège ne compte par lui-même que 260 pages. Il est suivi de deux tables : la première est un index alphabétique des entrées, la seconde un répertoire des pièces, dans lequel est indiqué, acte par acte, les termes illustrés par des citations qui en ont été extraites. Par exemple, dans l’École des femmes, une citation a été piochée dans la scène 1 de l’acte 1 pour figurer dans l’article Époux du dictionnaire.

La “légende dorée” de MOLIÈRE se trouvera égratignée, dès le début du XXe siècle, par des écrivains qui, comme Pierre LOUYS, relativiseront l’importance de son œuvre par rapport à celle de CORNEILLE. Certains critiques iront même jusqu’à le considérer comme un imposteur en soutenant une théorie très contestée. Il n’en demeure pas moins que MOLIÈRE s’impose jusqu’à nos jours comme le dramaturge français le plus connu en France et dans le monde.



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