Dictionnaire de l’homme sain et de l’homme malade
Auteur(s) : ROSSI Jérôme
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Nous ne disposons que de peu d’informations sur le docteur Jérôme ROSSI, auteur de ce Dictionnaire de l’homme sain et de l’homme malade. Malgré le relatif anonymat de son auteur, l’ouvrage présenté connaîtra un certain succès, puisqu’en 1894 il en sera à sa dixième édition. C’est à sa consœur Marie PIERRE que le docteur demandera de rédiger la préface. Ce choix n’est pas anodin car, à cette date, la France ne compte que 24 femmes médecins sur un total de 2808 praticiens ; et Madeleine BRÈS, la toute première d’entre elles, n’a obtenu son doctorat en France qu’en 1876. L’auteur semble avoir clairement ciblé le lectorat féminin car, à cette époque, en qualité de maîtresses du foyer, c’est souvent aux femmes qu’est dévolue la tâche de veiller aux questions d’hygiène et de santé.
Marie PIERRE en fait elle-même le constat : “Le bonheur, fait de bien-être physique et moral, dépend surtout de la femme, non pas que la femme soit un être à part dans cette humanité un peu folle, mais en vertu d’un droit donné par l’homme lui-même ; le droit de propriété sur la maison. En abandonnant au pouvoir de la femme la maison, on a cru lui donner peu de chose, un rien dédaigné, rejeté par l’homme ; on lui a cependant mis entre les mains le sceptre du bien-être.” L’objectif avoué de l’ouvrage est énoncé en ces termes : “Vous voulez montrer les relations étroites qui existent entre les conditions hygiéniques d’une maison et la santé de ceux qui l’habitent, vous voulez enfin apprendre à la femme la science de rendre heureuse la maison, de la faire aimer en y prodiguant l’air, le soleil, l’eau pure, et de satisfaire par une persévérante sagesse aux exigences du bien-être et de la santé.”
ROSSI vise à proposer un outil commode pour la vie quotidienne et à faire connaître les grandes avancées réalisées en termes d’hygiène et de médecine, en particulier depuis “la découverte des ferments, des microbes et des germes”. Publié par l’intermédiaire du Journal de la santé, hebdomadaire de vulgarisation médicale, le Dictionnaire de l’homme sain et de l’homme malade se présente comme un vadémécum destiné à assurer la bonne santé au sein du foyer. Les articles sont souvent courts, rédigés dans un langage clair et précis. Dans la plupart des cas ils sont assortis d’une rubrique “traitement”, qui formule conseils et remèdes. Même si le contenu des rubriques peut paraître succinct, on y trouve un panorama complet de la médecine de l’époque, avec diverses nouveautés telles que l’électrothérapie, la “méthode de Pasteur“, la vaccination et la musicothérapie. L’ouvrage détaille également les vertus de certains aliments et les caractéristiques de remèdes aisés à se procurer en pharmacie voire en épicerie. Ponctuellement, certains textes de loi en vigueur sont également repris. En revanche, le livre est dépourvu d’illustrations.
Quelques extraits
– Aboyeurs (toux des). — Toux des aboyeurs ou névrophonie, altération nerveuse involontaire de la fonction vocale, qui n’a aucun rapport avec l’aliénation mentale et qu’il ne faut point confondre avec le délire des aboyeurs. La toux ressemble à un aboiement de chien. Traitement. — Moyens hygiéniques, gymnastique, pointes de feu sur la colonne vertébrale, valérianate acide d’atropine, bromure de potassium, hydrothérapie.
– Absinthisme. — Forme particulière d’alcoolisme avec prédominance de symptômes nerveux. L’habitude de boire de l’absinthe peut produire des pituites gastriques, des rêves effrayants avec crampes, soubresauts nocturnes, cauchemars, abolition des fonctions génitales, sensations périphériques douloureuses, tremblements, hallucinations avec obtusion des sens. Fréquence des paralysies chez les femmes. La cessation brusque des habitudes ne doit pas se faire ; elle est défavorable. L’imperfection de la nutrition mène à la phtisie pulmonaire. Traitement. — Hydrothérapie, toniques, boissons aromatiques, thé et café, teinture de noix vomique, 8 à 10 gouttes par jour.
– Lieux à la turque – Défendus par les conseils d’hygiène. C’est tout simplement une ouverture à ras d’un plancher, et recouverte de dalles ; ces lieux sont malsains, à cause des infiltrations qui se produisent souvent entre les dalles ou dans les fissures des pierres ; de plus, rien ne fermant l’ouverture de la latrine, il en émane continuellement des gaz délétères. Ces lieux sont formellement interdits dans les écoles, où autrefois il y en avait beaucoup, à cause d’une certaine commodité de nettoyage.
– Vélocipédie— Le vélocipède est un bon exercice pour tous les sexes et pour tous les âges, à la condition d’être modéré, un tour de pédale en moyenne par seconde. Le vélocipède développe les membres supérieurs et inférieurs ; il active la respiration et la circulation ; il faut procéder à cet exercice d’une manière progressive ; si, dès le début, le vélocipédiste court trop vite et trop longtemps, il pourra survenir des maux de tête violents et des altérations organiques du cœur et des gros vaisseaux. Il faut se garder de courir après les repas. Le vélocipède, loin de donner des varices, les prévient, ainsi que les enflures et l’obésité. Le vélocipède doit être conseillé surtout aux jeunes filles pâles, anémiques, à tendances scrofuleuses et dont la menstruation s’établit difficilement. Le départ en voltige paraît préférable au point de vue de l’hygiène. Dans le départ en voltige, lorsque vous aurez saisi votre bicycle des deux mains par le gouvernail, que vous lui aurez donné une impulsion rapide et directe, vous courez sept ou huit pas auprès de lui, en le maintenant en équilibre ; d’un bond, en appuyant sur les manettes, vous vous enlevez comme si vous vouliez franchir une barrière et vous retombez en selle.