Dictionnaire de la langue française au XIIe et au XIIIe siècle
Auteur(s) : HIPPEAU Célestin
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Célestin HIPPEAU est professeur de philosophie et principal du collège de Bourbon de La Roche-sur-Yon. En 1837, il vient à Paris pour y créer un établissement secondaire privé, qui prend le nom d’École des Sciences appliquées. Six ans plus tard, il quitte cet établissement pour enseigner à la faculté des lettres de Strasbourg, puis à celle de Caen où il occupe la chaire de littérature française. Très impliqué dans plusieurs sociétés savantes et membre du CTHS, il s’intéresse en outre aux problématiques de pédagogie, d’instruction publique et d’éducation. Sollicité par Victor DURUY pour réfléchir à un enseignement secondaire destiné aux jeunes filles, il part en 1867 pour une mission d’observation aux États-Unis. Son rapport, publié en 1870, connaîtra un certain retentissement, et HIPPEAU sera amené par la suite, pour un objectif similaire, à effectuer des voyages d’étude dans plusieurs pays d’Europe.
En 1868, mis à la retraite à sa demande au terme d’une carrière universitaire bien remplie, il compte déjà à son actif une bibliographie très fournie consacrée à l’histoire littéraire, à l’histoire locale et à la philologie. Il s’est plus particulièrement spécialisé dans les éditions commentées d’écrivains du XVIIe siècle, ainsi que dans les écrits d’un grand nombre d’auteurs et de poètes médiévaux, qu’il va contribuer à sortir de leur relatif anonymat. En 1852, il publie Le Bestiaire divin de Guillaume LE CLERC DE NORMANDIE, qui est remarqué par le milieu littéraire. En visant cet ouvrage, le ministère de l’Instruction publique décide par décret qu”‘Il sera publié, par les soins du ministre de l’Instruction publique, un recueil général des poésies populaires de la France, soit qu’elles aient été déjà imprimées, soit qu’elles existent en manuscrits dans les bibliothèques, soit enfin qu’elles nous aient été transmises par les souvenirs successifs des générations”.
HIPPEAU est ensuite missionné pour se rendre en Angleterre au British Museum et à la Bodleian Library, afin d’y dénicher des manuscrits de poètes français médiévaux en vue d’une publication dans la Collection des poètes français du Moyen Âge, de l’éditeur Auguste AUBRY. Par ailleurs, bénéficiant d’un accès au fonds de la Bibliothèque impériale de Paris, il parvient à en exhumer plusieurs textes importants, dont Messire Gauvain ou la vengeance de Raguidel, Le Bel Inconnu, ou Giglain fils de messire Gauvain et de la fée aux blanches mains et Le Bestiaire d’amour.
Ses recherches lui valent d’acquérir une expertise unanimement reconnue dans le domaine de la langue française littéraire du Moyen Âge classique. Il établit un vaste lexique qu’il entreprend de publier dans un format simple – “un répertoire commode”, pour reprendre ses propres termes -, accessible à un public profane ou estudiantin désireux de s’initier aux textes en langue romane. C’est ainsi qu’entre 1866 et 1872 il fait publier les deux volumes d’un ouvrage intitulé Collection de poèmes français du XIIe et du XIIIe siècles, lequel constitue de facto un glossaire abrégé du français de cette époque.
Mais HIPPEAU, en partie insatisfait par son propre livre, s’attaque à une nouvelle version, qui paraît en 1873 sous le titre de Dictionnaire de la langue française au XIIe et au XIIIe siècle ; il s’agit de l’ouvrage présenté ici. Cette mise à jour reprend la première partie de son précédent glossaire, mais propose une version renouvelée, corrigée et augmentée du second tome. Dans l’introduction, il précise que cet ouvrage “renfermera moins de lacunes et d’erreurs grâce aux progrès accomplis dans la science depuis la composition du premier”. Par rapport à son précédent glossaire, il reprend et améliore l’introduction consacrée à l’évolution de la langue française, du bas latin à la langue romane médiévale.
Le dictionnaire en lui-même donne des équivalents en français moderne sans rentrer systématiquement dans les détails, ou alors de manière succincte. Par sa conception, il se rapproche plus d’un glossaire, utile pour accompagner la lecture d’un texte médiéval, que d’un dictionnaire encyclopédique sur la civilisation du Moyen Âge. Par exemple, l’auteur se contente de définir Bec de faucon comme une arme de guerre, sans en donner la description. De même, la définition de Bègue se résume à : nom d’un poisson ; Gyge : instrument de musique ; Maritorne : un impôt ; et Poupelin : une “sorte de gâteau”.
En revanche, HIPPEAU s’efforce le plus souvent possible d’assortir ses définitions d’indications étymologiques sur l’origine latine, germanique ou celtique de certains mots. De même, il indique des variantes régionales ou étrangères, en particulier anglaises et allemandes. En fin d’ouvrage, dans un court appendice, il a rassemblé un échantillon de quelques “locutions remarquables”. Il s’agit de citations tirées d’œuvres médiévales destinées à mettre en valeur certains des termes présentés dans le dictionnaire.
Bien que retraité, HIPPEAU poursuivra, jusqu’à sa mort en 1883, une très intense activité littéraire et éditoriale, aussi bien dans le domaine de l’éducation, de la littérature que dans celui de l’histoire. Publié peu de temps avant son décès, son Instruction publique en France pendant la Révolution se verra couronnée par l’Académie française. Sur le français médiéval, de nombreux dictionnaires beaucoup plus étoffés et détaillés verront le jour, en particulier le Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle, de Frédéric GODEFROY .
Quelques définitions tirées de ce dictionnaire
-Fliche, Flicque : quartier de porc, flèche de lard ; bas latin flichia ; angl. sax. flicce ; anglais flitche.
-Verne : aulne, mot d’origine celtique ; kymri gwern ; Vernay, Verney, Vernoy, aunaire, lieu planté d’aulnes.
-Huitante : quatre-vingts ; Huitaule, octave ; Huitisme, huitième ; Huit-Tiève, octave, espace de huit jours.
–Avriol, Auriol : maquereau, poisson péché le plus souvent en avril.
-Baudas, Bagdad ; Baudequin, Baudekin, étoffe de soie et d’or, et par extension dais, baldaquin ; ce mot est dérivé de la ville de Bagdad, d’où était tirée l’étoffe de soie.
-Perolotisier : condamner au pilori.