Français (langue), linguistique, Lexicographie

Dictionnaire analogique de la langue française

Répertoire complet des mots par les idées et des idées par les mots. Utilité plus que doublé du dictionnaire et adaptée à tous les besoins possibles de ceux qui lisent ou écrivent, entendent parler ou parlent eux-mêmes en français

Auteur(s) : BOISSIERE Jean-Baptiste Prudence

 Paris, Librairie Larousse, 17 rue Montparnasse
 dixième édition,augmentée de mots nouveaux et d'un complément (la première édition date de 1862)
  1908
 1 vol (XI-48-IV-1438 p.)
 In-quarto
 basane imprimée à froid, dos lisse ornés de motifs dorés


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Professeur de français en Angleterre, Jean-Baptiste Prudence BOISSIÈRE y fait la découverte du Thesaurus de Mark ROGET. Ce livre, rédigé au départ pour son usage personnel et encore édité à ce jour, est publié en 1852. Il deviendra rapidement un livre de référence pour la langue anglaise. Ouvrage innovant, il est basé sur un classement sémantique par arborescence et propose un modèle inédit de thésaurus allant bien au delà d’un simple dictionnaire de synonymes.

De retour en France, BOISSIÈRE fonde une école à Paris. Jugeant inadaptées et incomplètes les grammaires existantes, il développe une approche pédagogique fondée sur une grammaire graduée. En parallèle, il aspire à doter la langue française d’un équivalent du Thésaurus de ROGET et développe le projet d’un dictionnaire analogique du français. Il réalise un long et fastidieux travail de classement nécessitant, ainsi qu’il l’écrit, « une bonne dose de patience soutenue par une conviction forte ». Il ambitionne d’assigner à chaque mot une place dans une vaste nomenclature selon les sens différents qu’il peut recouvrir.

C’est ainsi que l’auteur adopte une approche onomasiologique de la langue en inversant la démarche habituelle de la lexicographie qui part du mot pour le définir. BOISSIÈRE fait ici le choix de partir de l’idée, du concept, pour rechercher les différentes expressions qui s’y rattachent. Il s’agit « de fournir, pour la première fois, un moyen commode de trouver les mots quand on a seulement l’idée des choses. »

Alors qu’un dictionnaire habituel, c’est-à-dire alphabétique, renseigne sur la signification des mots et des noms selon une approche sémiasiologique, un dictionnaire analogique « est destiné à faire trouver les mots ». Pour justifier sa démarche, il s’appuie sur un principe universel : « Rien n’est isolé dans la nature, tout se tient, tout s’enchaîne, dans le monde intellectuel aussi bien que dans le monde matériel. Il est donc impossible que l’idée exprimée, quelle qu’elle soit, ne se rattache pas à d’autres idées, parmi lesquelles on distingue aisément celle dont l’expression est le mieux connue. »

Sous chacun des 2 000 termes “usuels” retenus se trouve une suite de mots classés par ordre alphabétique. Ceux-ci, assortis d’une définition liminaire, sont censés être associés, directement ou indirectement, par une “communauté d’idées”, à l’essence même du mot principal. Par exemple, Livre regroupe aussi bien les mots Album, Agenda, Abécédaire, que Colportage, Souscripteur ou Plats. Anticipant la difficulté majeure de l’ouvrage, BOISSIÈRE intègre aux pages du dictionnaire des colonnes en haut de page avec une liste alphabétique de mots assortis de renvois aux rubriques auxquelles ils sont rattachés.

En 1859, BOISSIÈRE présente son manuscrit à LAROUSSE et BOYER, tous deux éditeurs mais aussi anciens instituteurs partisans d’une nouvelle pédagogie. Ces derniers réservent d’emblée un bon accueil à l’ouvrage en raison de son aspect totalement novateur. Le dictionnaire est publié pour la première fois en 1862 et, même si son fonctionnement rebutera certains critiques, car il nécessite un certain temps d’adaptation, cet ouvrage fera date et sera réédité de nombreuses fois. Destiné à intégrer les mots récents dans les domaines des sciences et de l’industrie, un complément est inséré avant le dictionnaire lui-même à partir de la neuvième édition de 1894. Pour compléter l’ensemble, un résumé de grammaire est placé en fin d’ouvrage.

À partir d’un lexique épuré et d’une simplification de forme, l’approche analogique fera école pour être reprise et améliorée par la suite par Paul ROUAIX, Charles MAQUET et surtout, près d’un siècle plus tard, Paul ROBERT, auteur du Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française.

Pour l’anecdote, on peut s’amuser à lire l’article consacré à BOISSIÈRE dans le Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, de Pierre LAROUSSE (présent sur Dicopathe). Il se conclut par une boutade de l’auteur de l’article qui, dissimulé derrière le pseudonyme assez transparent de SIÈREBOIS, n’est autre que le rédacteur du Dictionnaire analogique lui-même : « Ah ça, qui trompe-t-on ici ? On se nomme BLANC-BONNET, on signe BONNETBLANC, et le tour est joué, personne ne vous reconnaît. »



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