Toulouse (ville), Histoire de France

Biographie toulousaine

ou Dictionnaire historique des personnages qui par des vertus, des talens, de grandes actions, des fondations utiles, des opinions singulières, des erreurs, etc.,se sont rendus célèbres dans la ville de Toulouse, ou qui ont contribué à son illustration. Ouvrage précédé d'un précis de l'histoire de Toulouse, de tables chronologiques des souverains, évêques, archevêques, magistrats, etc. de cette cité ; des papes, cardinaux, grands aîtres de Malthe, qu'elle a fournis et des conciles qui s'y sont tenus.

Auteur(s) : LAMOTHE-LANGON Étienne-Léon de

 à Paris, chez L.G. MICHAUD, imprimeur-libraire, rue des Bons-enfants, n°34
 édition originale
  1823
 2 vol : tome 1. A-L (LVI-491 p.), tome 2. M-V ( 552 p.)
 In-octavo
 demi-cuir, dos lisse orné de motifs dorés


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Né à Montpellier en 1786, Étienne-Léon de LAMOTHE-LANGON passe sa jeunesse à Toulouse, où son père est membre du parlement. Après une scolarité agitée, pendant laquelle il rédige plusieurs pièces de théâtre et des romans qui resteront à l’état de manuscrits, il suit sa mère à Paris. Il fréquente alors les salons littéraires et connaît un certain succès en y lisant des poèmes de sa composition. Il publie un premier livre, dont le sujet se rapporte directement à son ancienne ville : Clémence Isaure et les troubadours, ouvrage qui sera traduit en allemand et en espagnol. Mais alors que ses ambitions littéraires semblent sur le point de se réaliser, il se lance dans une carrière administrative.

Auditeur de première classe au Conseil d’État impérial en 1809, il est nommé sous-préfet de Toulouse en 1811, fonction qui lui permet de devenir membre de l’Académie des Jeux floraux. Muté à Livourne en 1813, il est fait baron d’Empire, mais il se trouve écarté à la chute de NAPOLÉON. Pendant les Cent-Jours, il est un très éphémère préfet de Carcassonne. Malgré son passé, il est cette fois épargné par la seconde Restauration. Réhabilité pour avoir rédigé un pamphlet antinapoléonien, il occupe brièvement un poste de sous-préfet à Pons au cours de l’année 1819 mais, suite à des revers personnels et des soucis financiers, sa carrière administrative s’achève de manière abrupte. Il décide alors de regagner Toulouse et de ne plus vivre que de sa plume. Il se révèle être un auteur très fécond, qualité qui lui vaudra par la suite d’être traité de littérateur, de polygraphe ou encore de graphomane. Spécialisé dans la poésie, le théâtre et les sujets historiques, on lui attribuera à sa mort la paternité de près de 150 ouvrages, dont beaucoup publiés sous un nom d’emprunt ou de manière anonyme.

En 1823, il prend une part prépondérante à une entreprise ambitieuse, la Biographie toulousaine. Il s’agit de l’ouvrage présenté ici. Pour son élaboration il est associé à deux autres individus : Jean-Théodore LAURENT-GOUSSE, au sujet duquel nous ne disposons guère d’informations, et surtout Alexandre Louis DU MÈGE, un archéologue érudit qui jouera un grand rôle dans la préservation et la valorisation muséale du patrimoine toulousain. Le livre se présente comme un dictionnaire historique exhaustif des personnages qui se sont illustrés dans l’histoire de la grande cité occitane, depuis l’Antiquité jusqu’à l’époque contemporaine. Amoureux de leur ville, la “Société de gens de lettres”, signataire de l’ouvrage, déclare en préambule que “peu de villes en Europe, même les grandes capitales, pourraient former une liste aussi étendue de personnages remarquables, que celle dressée par nos soins, et composée des illustres Toulousains”, que ces derniers soient natifs de la ville ou simples citoyens d’adoption.

Le sujet ayant déjà été traité, les auteurs prennent soin de rendre hommage à leurs devanciers comme Guillaume CATEL et Germain de LA FAILLE. Ils revendiquent une “grande impartialité” sur le traitement des événements récents, sans occulter ceux qui ont rendu de “grands services à la France sous une autre bannière que celle des lis”. Anticipant le fait que leur œuvre allait engendrer des critiques de tous les bords politiques, les auteurs se félicitent d’avoir reçu le soutien de certaines personnalités, dont le baron de BELLEGARDE, maire de Toulouse, qui, disent-ils, “s’est empressé de nous faire fournir, avec l’obligeance qui le distingue, les documents nécessaires à notre travail, et que renfermaient ses bureaux. Il a senti combien cette entreprise était intéressante pour la ville qu’il administre à l’avantage du public et à la satisfaction du gouvernement qui lui en a donné naguère d’éclatants témoignages”.

Précédé d’un bref résumé de l’histoire de Toulouse, le livre enchaîne de manière assez classique des notices biographiques de longueurs très inégales, qui mettent à l’honneur des personnalités plus ou moins célèbres, au niveau local et national, comme  Marcus Primus ANTONIUS,  BERNARD de SEPTIMANIE, Clémence ISAURE, Jean de BOYSSONÉ, Maximilien de CAFFARELLI du FALGA, Jean CALASFrançois de CAULET, Jacques CUJASNicolas DALAYRAC, Pierre de FERMAT, l’abbé SICARD et Pierre BAYLE, qui avait étudié chez les Jésuites à Toulouse avant de se convertir au catholicisme puis d’abjurer. Les contributeurs s’attardent également sur des individus singuliers peu connus en dehors de Toulouse, comme le dénommé ABDALLAH, un ancien soldat devenu mamelouk, le bibliophile Justin MacCARTHY-REAGH, le troubadour Pierre VIDAL et le député Casimir de CAZALÉS. Notons enfin que LAMOTHE-LANGON n’oublie pas ses propres aïeux et saisit l’occasion de les intégrer dans l’ouvrage, dont son père Marie-Joseph, condamné par le tribunal révolutionnaire et guillotiné en juillet 1794.

Notre polygraphe poursuivra avec entrain sa prolifique carrière d’écrivain, s’essayant au roman fantastique et aux récits policiers. Mais son imagination va surtout s’illustrer dans le domaine des essais historiques et des mémoires, riches en anecdotes savoureuses sur des personnes célèbres. En vérité, si la postérité a retenu le nom de cet écrivain imaginatif, c’est avant tout à cause de ses impostures littéraires. Il est en effet l’auteur de mémoires fictives de personnages aussi divers que la comtesse du BARRY, le marquis de CAMBACÉRÈS, LOUIS XVIII, NAPOLÉON, ou encore  le duc de RICHELIEU. À côté de ces personnages prestigieux, il ne s’est pas privé de s’abriter derrière d’autres identités pour laisser libre cours à son imagination. C’est ainsi qu’il publiera des livres aussi divers que : Mémoires d’un émigré, Mémoires tirés des archives de la police de Paris pour servir à l’histoire de la morale et de la police, depuis Louis XIV à nos jours, Mémoires d’une femme de qualité, Souvenirs de Léonard, coiffeur de Marie-Antoinette, etc. 

Mais la falsification la plus notoire de LAMOTHE-LANGON porte sur son Histoire de l’Inquisition. Publiée en 1829, cette étude prétendait s’appuyer sur des documents jusque-là inexploités, censés avoir été retrouvés dans les archives du diocèse de Toulouse. Le travail présentait toutes les apparences de sérieux, car l’auteur y décrivait des crimes imputables aux tribunaux inquisitoriaux, en précisant les noms des victimes, les dates et les lieux où ils ont été commis. Or, comme il le sera révélé bien plus tard – l’imposture ne sera démontrée qu’en 1970 -, les archives citées n’ont jamais existé et notre romancier a largement brodé, en puisant allégrement  dans le “folklore” gothique et romantique. Pour autant, le livre va être pris au sérieux par les intellectuels, toujours prompts à dénoncer les abus, les horreurs et l’arbitraire des “âges sombres”. Ainsi cet essai, pourtant très fantaisiste dans le fond comme dans la forme, va influencer nombre d’écrivains, mais aussi des historiens comme Jules MICHELET et Joseph HANSEN. Après être retourné vivre à Paris en 1844 pour une raison inconnue, LAMOTHE-LANGON semble s’être progressivement mis en retrait de la carrière littéraire. C’est dans cette ville que, quasiment oublié et vivant dans la gêne, il mourra en 1864.



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